VOICE OF RUIN
Les petits ruisseaux font les grandes rivières…

Au cours de ces quatre dernières décennies, la Suisse nous a toujours offert de nouvelles formations de Métal intéressantes et de qualité, et ce dans divers sous-genres de la famille musicale que l’on chérit tant : Hellhammer, Celtic Frost, puis plus récemment Triptykon en matière de Black/Dark Metal, Coroner avec son Techno Thrash, Nostromo et son Grindcore. Plus récemment, nous avons eu droit à Eluveitie en matière de Folk Metal, Cellar Darling et son Métal atmosphérique et mélancolique, ou bien encore Sybreed qui a malheureusement splitté au grand dam des fans de Métal plus moderne (Indus). Formé en 2008 en Suisse romande, Voice of Ruin ne déroge pas à cette règle, perpétuant même avec brio cette tradition helvète. En témoigne leur troisième album, le très réussi Acheron mêlant Death Metal mélodique, Groove et Thrash moderne. Comme quoi nos voisins suisses ne sont pas si lents que ça à la détente…
[Entretien avec Randy Schaller (chant) et Nicolas Haerri (guitare) par Seigneur Fred – Photo : DR]

Voice of Ruin band

Comment se porte la scène helvète par chez vous du côté de Nyon dans le canton de Vaud en Suisse de nos jours, et plus généralement en Suisse romande (francophone) ?
Randy : La Suisse regorge d’une grande quantité de groupes talentueux ! Aux alentours de Nyon, il y a notamment Genève qui est la plus grande ville de suisse romande et aussi la ville qui compte, à mon goût, le plus de groupes de qualité dans le pays. Si je te dis Nostromo, Knut, Impure Wilhelmina, Promethée, Sybreed, Mumakil ou encore Rorcal, ça te parle ? Ce sont tous des artistes basés à Genève. Donc plutôt pas mal pour une « petite ville » de 500 000 habitants.

Acheron est déjà votre troisième album studio depuis votre formation en 2008 en Suisse donc, après deux démos et deux précédents albums entrecoupés d’un EP intitulé Consumed paru en 2015. Vous êtes plutôt productifs et rapides finalement pour un groupe suisse, non ? (rires)
Randy : Haha !! (rires) C’est vrai que les Suisses ont la réputation d’être lents. Je n’ai jamais vraiment compris pourquoi, mais cela doit venir de notre façon de parler et de notre système politique où les décisions prennent toujours plus de temps à être prises qu’ailleurs (rires). Au début on ne s’était jamais vraiment fixé d’objectifs en matière de productivité, on composait et quand on commençait à avoir une dizaine de titres, on réservait le studio ! C’est à partir de fin 2015 qu’on a commencé à se fixer des délais suite aux multiples changements de line-up auxquels nous avions dû faire face. Quand Nicolas est arrivé début 2015, on s’était directement dit qu’il fallait se pencher sur un nouvel album et que ce serait bien de l’enregistrer fin 2016. Ensuite Dario est arrivé à la batterie début 2016 et on avait déjà pas mal avancé la composition de l’album Purge and Purify. Comme on enchaînait les dates en même temps, il a dû apprendre le set complet et les nouveaux titres pour le studio en quelques mois. Darryl, notre guitariste soliste, est arrivé quelques mois avant l’enregistrement de cet album, c’était également un défi pour lui. Mais finalement, cet enregistrement en Angleterre s’est super bien passé et on est très content de cet album. Quand Purge and Purify est sorti en 2017, tout s’est accéléré pour nous. Les shows et festivals devenaient de plus en plus gros et on voyait que notre fan base grandissait. On s’est donc directement fixé l’objectif de ne pas laisser passer plus de deux ans entre Purge and Purify et ce nouvel album. On a même fait deux pauses de quelques mois sans concert pour se concentrer sur la composition dans le but d’atteindre cet objectif.

Plus sérieusement, vous avez pas mal travaillé en studio ces dernières année, la preuve avec votre discographie… Mais Voice of Ruin a aussi beaucoup joué live et tourné au côté de grands groupes américains ou européens. Pensez-vous qu’Acheron est le fruit naturel de tout cela aujourd’hui, que ce soit au niveau du travail d’écriture et de composition des nouveaux morceaux, également en matière de technique et de leur performance mais aussi au niveau de la production sonore signée Fredrik Nordström (At The Gates, In Flames, The Haunted, Arch Enemy, Architects, Dimmu Borgir…) et Henrik Udd ?
Randy : Voice Of Ruin a toujours été un groupe qui ne brûle pas les étapes si tu vois ce que je veux dire… Je pense qu’une (légère) courbe ascendante linéaire serait idéale pour représenter le groupe (rires). Ce n’est pas du jour au lendemain qu’on s’est retrouvé en première partie de groupes tels que Sepultura ou Cannibal Corpse, ou sur la main stage du Festival Metal Days. Toutes ces étapes ont pris du temps et ont demandé du travail et de l’engagement, tout comme le fait de se retrouver dans un tel studio en Suède avec ces producteurs mythiques. A mon avis, Acheron est donc le fruit naturel de tout ce travail accompli au fil des années. Et c’est clair que pour l’écriture de ce disque, on a repoussé nos limites encore plus loin. On a vraiment cette envie d’évoluer et de proposer quelque chose de différent au fil des albums et des années.
Nicolas : Cette question rejoint un peu la précédente, dans le sens où comme Randy l’a mentionné, notre line-up est le même depuis maintenant deux albums et cela nous a vraiment permis de grandir à cinq et aborder chaque nouvelle étape “en groupe” et c’est un vrai changement pour nous. Quand nous avons composé Purge and Purify nous n’avions pas franchement le temps de nous poser trop de questions, c’était un peu « go go go ! » tout le temps, faisons et réfléchissons après. Pour le cycle de ce nouvel album Acheron, nous avons eu le temps de nous poser les questions avant d’agir. Et je pense que cela se ressent dans nos morceaux. Cela nous a également permis de franchir tranquillement, mais sûrement, quelques paliers, que ce soit au niveau des shows live ou du studio comme tu le mentionnes à juste titre.

Voice Of Ruin sur les bords du lac Léman
Voice Of Ruin sur les bords du lac Léman

On ressent clairement une grande maturité dans les nouvelles compostions avec un grand pas en avant dans la construction des chansons terriblement efficaces, avec un gros travail sur les mélodies et un dosage subtil entre puissance et mélodie, le tout avec un son excellent sur l’album ! Tout est parfaitement en place. Maintenant que le nouvel album est sorti, avez-vous le sentiment du devoir accompli au sein du groupe, voire même d’avoir réalisé l’album parfait avec Acheron ? (sourires)
Randy : Merci pour le compliment. Nous sommes hyper satisfaits de cet album, autant au niveau du son que des morceaux et du visuel. C’est clairement notre meilleur album à ce jour. C’est aussi le deuxième album avec le même line-up, ce qui a permis d’évoluer ensemble autant au niveau technique que musical. Je pense que c’est aussi l’une des forces d’Acheron. Après je ne pense pas qu’on puisse dire qu’Acheron est l’album parfait, je vois plus un album comme une photographie à un moment précis dans le temps. A ce jour, on le considère comme notre meilleur travail, mais j’espère qu’on dira la même chose du prochain, sinon c’est qu’il faut arrêter. (rires) Quant au devoir accompli, c’est clair qu’on a le sentiment d’avoir fait les choses comme il le fallait avec ce disque.

Musicalement, on baigne ici entre un Death Metal mélodique teinté de légères influences Black et Thrash, le tout avec une approche groovy très moderne me rappelant parfois le groupe américain Dååth notamment par la dynamique rythmique et grande variété technique présentes sur Acheron, sans le côté toutefois progressif présent sur leurs dernières œuvres. Sincèrement, Dååth constitue-t’il une influence majeure pour Voice Of Ruin ?
Randy : Premièrement, c’est clair qu’on baigne dans ces styles. Quand on compose, on ne se met pas de barrière au niveau stylistique. Je pense que la musique de Voice Of Ruin représente plus ou moins le mélange de groupes qu’on écoute tous et, quelque part, la musique qu’on aimerait écouter (rires). Alors honnêtement, j’avais complétement oublié ce super groupe. En réécoutant à l’instant, c’est vrai qu’il y a une jolie ressemblance avec notre musique. Je vais d’ailleurs me refaire leurs albums, merci du rappel !
Nicolas : C’est bien la première fois qu’on nous compare à Daath, bien vu. C’est effectivement un groupe que j’ai beaucoup écouté, notamment l’album The Concealers. Le travail de guitare d’Emil Wrestler est vraiment incroyable. Bien qu’on en soit loin au niveau technique, c’est néanmoins une influence qui m’a sûrement marqué un peu plus jeune et qui a laissé une empreinte dans mon jeu de guitare et ma manière de composer.

Artwork de l’album Acheron réalisé par l’artiste français Valnoir (alias « Metastazis »)

Penchons-nous à présent sur les paroles de ce troisième album si vous voulez bien. Acheron est-il un concept album car il s’écoute avec une grande fluidité et son visuel signé de l’artiste français Valnoir (alias ici « Metastazis ») invite à se plonger dedans ? On dirait une cité en feu dans un pays slave/orthodoxe à la vue des clochers mais Acheron n’est-il pas une porte ou une rivière affluente du Styx conduisant tout droit au royaume d’Hadès : les Enfers (cf. mythologie grecque) ?
Randy : Pour chaque album je me fixe un thème général et pour Acheron j’ai continué sur la thématique des problèmes et catastrophes qui traversent les siècles, toujours en mélangeant fiction et réalité. Sur certains titres, j’ai mis l’accent sur la période du Moyen-Âge qui m’a toujours passionnée. Et sur d’autres, je me suis concentré sur certaines peurs contre lesquelles le cerveau humain lutte depuis toujours. Une fois que le tout était écrit et composé, on a directement pensé à Valnoir pour le visuel. Il a été emballé par le projet et il a proposé cet artwork en se basant sur les textes et la musique. On est directement tombé amoureux de ce visuel qui représente parfaitement l’album. C’est là qu’on a décidé de l’intituler Acheron. L’Acheron est en effet une des branches de la rivière Styx qui mène aux Enfers. Comme les textes naviguent entre fiction et réalité, il fallait un titre qui puisse représenter ceci, et Acheron était justement le nom parfait vu que c’est une rivière qui existe réellement et qui est illustrée, comme expliqué précédemment, dans la mythologie grecque.

Franchement, qu’aimeriez-vous ajouté à propos de ce nouvel album Acheron car c’est probablement l’une des belles surprises de ce dernier semestre ? Quelque chose qui vous tient à cœur ou bien une anecdote à son sujet ?
Randy : Rien qui ne me vienne à l’esprit… On est déjà super content de voir que l’album plait à nos fans et on espère qu’il nous permettra de faire un maximum de dates !
Nicolas : Acheron représente un changement de dynamique important pour le groupe. La manière dont nous avons composé cet album en témoigne. Il est plus collaboratif comme album mais également plus engagé, le processus de composition n’a pas toujours été de tout repos. Mais c’est sûrement ce qui nous a permis de nous dépasser. Je pense que cet album a posé les bases d’un changement pour Voice Of Ruin.

Vous allez tourner en Europe cet automne et notamment en France. J’ai d’ailleurs vu que vous jouerez dans le cadre d’un petit festival local, le SID Festival, le 16/11/2019 or je n’ai rien vu de confirmer sur internet à ce sujet à cette heure. Confirmez-vous cette date de la ville de Tours au SID Festival ? A défaut, avez-vous une autre date en région Centre-Val de Loire de prévue en France ? Enfin, avez-vous quelques infos à propos de cette tournée et votre venue en France ? Vous allez jouer en tête d’affiche ou en support d’un autre groupe ?
Randy : Oui, alors justement cette date était confirmée mais a été déplacée en 2020. Nous n’étions malheureusement pas disponibles sur le nouveau créneau proposé en 2020, mais nous sommes toujours en contact avec l’organisation pour notre retour sur Tours. Actuellement, nous sommes justement en plein dans le booking des concerts du premier semestre 2020 et plusieurs dates un peu partout en France devraient se confirmer, je ne peux pas t’en dire plus pour le moment (sourires).

En guise de conclusion, quels sont les projets pour la fin d’année donc, mais aussi l’an prochain (tournée, festivals d’été 2020, etc.) ?
Randy : On est en plein milieu du premier cycle de dates pour la promotion de ce nouvel album en Suisse, France et Allemagne. La fin de cette année sera donc dédiée à la scène et à la promotion du disque. On a déjà un nouveau clip vidéo sinon de prêt pour janvier 2020 et on travaille donc sur le booking de la tournée 2020. On a déjà plusieurs festivals de confirmés et des shows en Suisse, France et Hollande. On se réjouit de tout ça et on se réjouit déjà de revoir nos amis français en 2020 ! Un grand merci à toi pour toutes tes questions et très heureux de voir que cet album te plaise autant… (sourires)

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